Reportages

09.10.2025 : Arlon – Conférence du Pr Roland Gillet

Compte rendu de la conférence du Professeur Roland Gillet

Province du Luxembourg & Cercle Européen Pierre Werner – Palais Provincial d’Arlon – 9 octobre 2025
Thème : « La gestion des relations géopolitiques et économiques avec nos amis Américains : de l’Europe aux deux Luxembourg »

Devant une salle comble, M. le Gouverneur, Olivier Schmitz, hôte de la conférence, a présenté notre conférencier invité avec qui il a tissé des liens d’amitié de longue date.  Lors de son intervention, M. Daniel Hussin, président d’Honneur du Cercle, a mis en avant l’intérêt du gouverneur pour les relations transfrontalières principalement avec le Luxembourg et son intention de collaborer avec le Cercle Pierre Werner à l’organisation de nouvelles réunions avec les communes de la province (suivi des réunions de 2019).  Avant de donner la parole au Professeur Roland Gillet, Fabien Bolle, secrétaire général adjoint du Cercle, a rappelé les liens profonds de notre orateur avec le Luxembourg et, en particulier la Ville de la Roche en Ardenne.

Le Professeur Roland Gillet a ouvert sa conférence en dressant un état des lieux des relations économiques et géopolitiques entre l’Europe et les États-Unis. Il a d’abord souligné les différences fondamentales en matière énergétique : les États-Unis sont aujourd’hui le premier producteur mondial de pétrole, notamment grâce à l’exploitation du pétrole de schiste, et bénéficient de l’électricité « bleue » (hydroélectricité) fournie par le Canada.

L’Europe, en revanche, reste dépendante de ressources externes – qu’il s’agisse du gaz russe encore pour une part, du pétrole des pays de l’OPEP et des Etats-Unis. Durant la crise énergétique post-Covid, les États-Unis ont d’ailleurs joué un rôle stabilisateur en puisant dans leurs réserves stratégiques pour contenir la flambée des prix provoquée par la réticence de certains membres de l’OPEP à augmenter leur production.

Le professeur Gillet a ensuite abordé la question de la coûteuse transition énergétique européenne, qu’il juge à ce stade peu efficace et peu rentable. Malgré les investissements massifs dans le renouvelable, la majorité de l’énergie consommée en Europe reste d’origine fossile, et le recours croissant à l’électricité déplace encore trop souvent la pollution vers les pays, dont l’Allemagne, qui pallient les pénuries par le charbon ou le lignite. Ce qui n’apparaît pas très éthique (ESG), un mot pourtant dans l’ère du temps.

Sur le plan militaire, Roland Gillet a rappelé que la majorité des Etats européens ont longtemps manqué à leurs engagements envers l’OTAN, n’allouant pas les 2 % de leur PIB à la défense. Ce n’est qu’à la suite de l’invasion de l’Ukraine et des pressions de Donald Trump, que les États membres ont commencé à investir davantage. Le professeur a insisté sur l’importance de renforcer l’OTAN plutôt que de multiplier les initiatives nationales très coûteuses et pas suffisamment coordonnées au niveau européen.

Enfin, il a alerté sur les taux d’endettement publics très élevés en Europe. Si les États-Unis affichent un taux d’endettement plus élevé par rapport à leur PIB, ces derniers financent davantage des investissements productifs, tandis qu’en Europe, la dette alimente surtout la dépense sociale et environnementale, avec un retour sur investissement très limité. Il a plaidé pour des politiques budgétaires et monétaires plus rigoureuses et cohérentes afin de préserver la crédibilité financière des États, le pouvoir d’achat des consommateurs et la motivation des entrepreneurs et des investisseurs.

En conclusion, Roland Gillet a insisté sur la nécessité de continuer à privilégier une coopération avec les États-Unis, tant sur le plan économique que militaire, même si cela demande une réelle agilité de circonstance dans la collaboration avec Donald Trump.

Il plaide également en faveur d’une meilleure reconnaissance des forces vives de nos économies au travers d’une meilleure valorisation des courageux et des audacieux, qui acceptent au-delà de la force de leur travail, de supporter le risque entrepreneurial via leurs fonds propres. Seule une économie qui récompense l’investissement et l’audace entrepreneuriale pourra générer une croissance durable et in fine permettre une redistribution sociale à la hauteur des défis de nos sociétés et ceux des générations futures.